Page 135 - Le travail post-retraite
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Réserve médicale : organiser le long terme
L’étude « Quelle démographie récente et à venir pour les professions médicales et pharmaceutique?»* de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) met le fait en évi- dence: il y a un manque d’adéquation entre les besoins quantitatifs d’une population vieillissante, au moins jusqu’en 2030, avec parfois une géographie territoriale à trous, et une évolution de la pratique médicale vers le salariat pouvant rendre les praticiens moins disponibles pour le patient. Chaque coup dur dans un avenir proche, épidémie ou pan- démie, peut donc nécessiter l’indispensable implication des aînés. Mais leur concours peut appeler l’actualisation de leurs compétences pour un réel bénéfice sanitaire.
Alors, est-il possible de les admettre dans une équipe à la discrétion de laquelle serait laissée le réapprentissage de la réalisation d’une perfu- sion (Michel Cymes), ou l’art de l’interrogation du patient potentiel et de l’établissement d’un diagnostic médical par téléphone (Henri Faugon)? Ne risquent-ils pas de causer plus de dégâts que de soins efficaces? L’urgence crée le besoin. Elle suscite l’enthousiasme de professionnels que la retraite peut avoir déçu, comme celui du généraliste Claude Leicher, 66 ans : « Lorsque j’ai réalisé que le pays allait avoir besoin de toutes ses forces médicales, j’ai foncé»141. Mais, l’impréparation ou l’inadéquation de l’offre de compétences ne peuvent-elles avoir un résultat désastreux ?
Reprendre son métier du jour au lendemain n’est pas anodin, selon le Dr Leicher. Réflexes, appropriation du matériel médical, récupération des automatismes priment. Le généraliste qui redevient généraliste est moins déphasé que le spécialiste ramené à une pratique plus basique.
* « Sous hypothèses de comportements et de législation constants, le modèle de projec- tion des effectifs de médecins montre une stagnation des effectifs jusqu’en 2030, avant une hausse assez importante des effectifs de médecins jusqu’en 2050 (+1,5 % de crois- sance annuelle moyenne des effectifs entre 2030 et 2050). Cette hausse se traduirait en partie par l’augmentation de l’exercice salarié, qui est le mode d’exercice à l’installation le plus souvent choisi par les médecins nouvellement diplômés. En revanche, compte tenu de l’augmentation de la population, le modèle montre une diminution de la den- sité médicale en France dans les prochaines années sous hypothèses de comporte- ments et de législation constants. Cette baisse est plus forte si l’on considère la densité médicale standardisée, qui tient compte de la hausse des besoins de soins induite par le vieillissement de la population. La densité médicale standardisée retrouverait son niveau actuel seulement au milieu des années 2030 puis repartirait à la hausse pour être supérieure de 23 % à la densité actuelle en 2050. » Source : Étude « Quelle démo- graphie récente et à venir pour les professions médicales et pharmaceutique ? Constat et projections démographiques », Les dossiers de la DREES, n°76, mars 2021.
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