Page 62 - Le travail post-retraite
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Le travail post-retraite
pêche de homards... Ce goût sous-entend une exigence de résultat à son propre égard. Par exemple: «15 août 1982: insomnie à 4 heures du matin: j’ai rarement, heureusement, de soudains aperçus de la vie de vieillard, de ma vie de vieillarde. Et je les refuse. Je me res- pecte trop pour subsister au rabais et je n’aime que FAIRE.»
Mais, on aurait tort d’assimiler l’auteur des ouvrages Le Féminin pluriel (1965), Ainsi soit-elle (1975) et La Touche étoile (2006) à une stakhanoviste monomaniaque. Le travail est l’une des compo- santes d’une vie fondée sur la jouissance déculpabilisée, le plai- sir par l’action, y compris sur soi si nécessaire: «Unlifting, c’est fait pour l’aventure en général, pour un amant à la rigueur, mais avant tout, c’est fait contre. Contre l’âge qu’on a. Quel qu’il soit!» S’accommoder, s’aménager pour ne pas renoncer: «La vieil- lesse est si longue qu’il ne faut pas la commencer trop tôt64.» Son Journal d’Irlande (2018) détaille à loisir un bon demi-siècle de taquin sensuel fondé sur un mariage complice avec le romancier Paul Guimard, « qui n’avait pas fait vœu de monogamie », et une liai- son parallèle avec un soldat américain de la Libération. La «sen- sation d’être aimée à la folie vaut toutes les crèmes de jouvence», explique-t-elle comme on divulguerait une recette. Et le travail? «Se battre, c’est fou ce que ça paie: on gagne dix ans au moins65.»
Le bénéfice santé d’une activité porteuse de sens
Formulée d’une autre manière, voici la confirmation des études médi- cales supportant l’argumentation de Françoise Forette. Les économistes insistent sur le bien-être, le bonheur ressenti, le sentiment d’être en phase avec son « moi ». Ceci ne signifie pas « trip new age », « fumette » ou enfermement dans la coquille à miroirs d’un narcissisme enfin revendiqué ! De quoi s’agit-il ? D’un souci de soi valorisant et altruiste.
Jean-Hervé Lorenzi et ses confrères étendent la préoccupation des médecins pour la bonne santé des aînés à un équilibre de viesociale- ment structuré: «Le bien-être des retraités dépend de trois conditions fondamentales, un revenu décent, une attention portée à sa propre santé, et une activité sociale modérément contraignante, pas nécessairement rémunérée mais porteuse d’un sens66. » Et de redessiner le profil des car- rières : « On distinguera probablement demain une période d’activité, très
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